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USQUARE : la recherche en géothermie à ciel ouvert

L’énergie géothermique se distingue par ses nombreux atouts : propre, disponible 24/7, exploitée directement sur site et réversible (production de chaud et de froid). En plus de rendements supérieurs à ceux des pompes à chaleur aérothermiques, la géothermie permet même le stockage saisonnier de l’énergie thermique. C’est également une source d’énergie renouvelable, pour autant qu’elle soit correctement exploitée. En effet, un système sous-dimensionné ou surexploité peut compromettre la régénération naturelle du réservoir souterrain, compromettant ainsi ses performances. Or, les pompes à chaleur géothermiques disponibles sur le marché répondent exclusivement aux besoins énergétiques des bâtiments, sans intégrer un contrôle adaptatif de l’extraction de chaleur du sous-sol en fonction de l’état du réservoir naturel.


La recherche contribuant à une meilleure compréhension des interactions entre le sous-sol, les installations et les usages énergétiques reste donc indispensable pour optimiser cette technologie et garantir sa durabilité.

Une collaboration entre ingénieurs et géoscientifiques


À l’ULB, Pierre Gerard du Laboratoire de GéoMécanique (BATir) et Corentin Caudron du service G-Time travaillent conjointement depuis plusieurs années à la mise au point de solutions de monitoring du sous-sol. Leur objectif est d’assurer un suivi précis des opérations géothermiques afin de garantir leur durabilité et leur caractère renouvelable.

Deux approches développées s’appuient sur une même technologie : l’installation de fibres optiques dans le sous-sol le long des sondes géothermiques. La première approche vise à cartographier en temps réel le champ de température dans le sous-sol autour des sondes géothermiques sur base de mesures locales de températures fournies par les fibres optiques. L’autre approche repose sur la sismique passive (technologie basée sur le bruit sismique ambiant) et permet l’obtention de données de contraintes et de température du sous-sol avec une résolution spatiale et temporelle élevée.


Ces capteurs par fibres optiques sont déployés le long des sondes géothermiques lors de leur installation dans le sous-sol et n’interfèrent pas avec les opérations géothermiques. Par conséquent, ils se révèlent particulièrement attractifs pour la surveillance de ces opérations à différentes échelles et dans des environnements géologiques variés.

Usquare, un site pilote au service de la recherche


Dans le cadre de leurs travaux, les deux équipes de recherche ont participé à l’installation de fibres optiques le long d’une série d’échangeurs de chaleur forés à Usquare, sur le site de l’ancienne école de gendarmerie d’Ixelles. Cette installation repose sur un système géothermique « basse-température peu profond ». La Société d’Aménagement Urbain (SAU), qui a été désignée par la Région de Bruxelles-Capitale pour coordonner les différentes opérations sur le site, est le pouvoir adjudicateur permettant cette collaboration scientifique enrichissante.

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Figure 1: Forage des sondes géothermiques sur le site de Usquare. Photo : Abdoulaye Kane

Au total, 14 sondes géothermiques de 115 mètres de profondeur ont donc été équipées de différentes combinaisons de réseaux « FBG » (réseaux de Bragg sur fibre) pour une détection ponctuelle précise de la température et de la déformation du sous-sol, ainsi que de câbles « DAS » pour une détection de la contrainte distribuée. Une fibre optique horizontale a également été installée afin d’obtenir une image en 3 dimensions du site.

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Figure 2: Insertion des fibres optiques le long des sondes géothermiques de Usquare par les équipes de BATir et G-Time de l’ULB. Photo : Abdoulaye Kane

Ces équipements fournissent des informations cruciales sur la réponse du sous-sol lors des phases d’extraction et d’injection de chaleur depuis ou dans le sol. En effet, le champ de 132 échangeurs de chaleur forés actuellement à USquare alimentera un réseau de chaleur développé à l’échelle du site de 3,95 hectares.

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Figure 3: Champ de sondes principal terminé, avec connexions horizontales. Photo : François Heynderickx

Les résultats préliminaires montrent que le monitoring du bruit sismique (c’est-à-dire l’amplitude du bruit en fonction de la profondeur) fournit des informations précieuses pour la caractérisation des propriétés géothermiques du sous-sol. Aussi, l’obtention régulière de profils verticaux de température permet d’estimer le gradient géothermique local et sa variabilité après l’achèvement du forage. Ces avancées offrent des perspectives prometteuses : elles renforcent non seulement la compréhension des systèmes géothermiques, mais ouvrent également la voie à leur optimisation.

Notre pays ayant récemment décidé d’investir massivement dans la géothermie dans plusieurs régions et dans des contextes variés, ces résultats auront un impact significatif sur d’autres projets pour lesquels la caractérisation des réservoirs géothermaux et des opérations sera cruciale.

De nombreux défis restent encore à relever : la géothermie nécessite encore des recherches approfondies pour décrypter pleinement ses mécanismes et en tirer le meilleur parti tout en respectant les contraintes environnementales.

Auteurs :

Pierre Gerard – École Polytechnique de Bruxelles, Service BATir, Laboratoire de GéoMécanique (Professeur)
Corentin Caudron – Faculté des Sciences, Service G-Time (Chargé de cours, Investigateur WelRI)
Julie Blavier – Conseillère scientifique, Knowledge Transfer Office, Département recherche de l’ULB
Antoine Delers – Conseiller en communication, Département recherche de l’ULB

L’installation des fibres optiques et des équipements de monitoring du sous-sol a été permise grâce au financement obtenu par l’ULB dans le cadre du plan de relance européen (plan pour la reprise et la résilience, NextGenerationEU volet REPower EU) et la Fédération Wallonie-Bruxelles.