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Le biome urbain

L’inspiration du vivant – La nature n’a pas attendu les architectes et les urbanistes pour concevoir des structures parfaitement adaptées à une fonction et à un contexte. S’inspirer de la nature, c’est tendre vers cet idéal, c’est concevoir un bâtiment comme un organisme vivant, évolutif, réactif et résilient.

C’est apprendre à composer avec ces règles invisibles qui ont produit autant de richesse, de diversité et de beauté sur notre planète.

La ville elle-même s’apparente à un organisme vivant, composée de cellules, de tissus et d’organes qui interagissent entre eux, réagissent à leur environnement, vieillissent, sont parfois malades et possèdent la faculté de se régénérer, d’opérer une mutation. Notre compréhension de la ville gagne ainsi à s’inspirer de la complexité du vivant, à l’image du corps humain composé de milliards de micro-organismes, bactéries et champignons, qui vivent en équilibre dans notre organisme, et qui constituent avec lui un écosystème complexe et résilient.

Bien sûr, la ville contemporaine est le lieu de tous les excès, et comme dans tout système, les excès provoquent les dysfonctionnements qu’il convient de prévenir ou de soigner. Pour autant, il faut arrêter d’opposer ville et nature. Les individus ont besoin de la ville, et la ville a besoin de la nature. Les deux notions sont parfaitement compatibles pour autant qu’un juste équilibre soit préservé, en respectant le vivant.

Crise systémique
La crise sanitaire que le monde affronte en 2020, apparemment exceptionnelle, est en réalité un phénomène parmi tant d‘autres qui ont jalonné l’histoire de l’humanité. L’humanité s’adaptera comme elle s’est toujours adaptée.

Elle est évidemment un drame humain du fait des milliers de morts victimes du virus, mais ces milliers de morts ne sont que la conséquence immédiate d’une crise qui aura une portée beaucoup plus large, de manière systémique : crise économique puis sociale, et sans doute politique. Et cette crise est elle-même la résultante des dysfonctionnements liés à la surconsommation, à la surexploitation des ressources naturelles et à la mondialisation.

Au travers du confinement qu’elle a imposé aux populations, la crise sanitaire a bousculé nos habitudes de vie. Elle a montré comment la ville était capable de s’adapter très vite à des nouveaux comportements, en matière de mobilité, de consommation ou de solidarité.

Mais au-delà des changements de paradigmes qu’elle induit – production des biens et des services, mixité des fonctions, organisation des soins de santé…, c’est sans doute au niveau individuel que l’impact est le plus significatif. Cette crise a imposé à chacun une réflexion profonde sur ce qu’il est, ce qu’il veut faire de sa vie, si fragile, et dans quelles conditions il veut désormais vivre, travailler, consommer, voyager. Le bien-être et l’épanouissement individuel et collectif sont donc plus que jamais au cœur de la conception du cadre de vie.

Écosystème urbain
L’écosystème urbain nécessite donc une approche systémique pour répondre aux enjeux climatiques, sanitaires et sociaux qui se font de plus en plus pressants. Au cœur de cette approche, l’économie circulaire tend à limiter la consommation des matières premières et des sources d’énergies non renouvelables, en favorisant le recyclage des matières organiques comme des équipements techniques.

De ce point de vue, la construction bois démontre chaque jour ses vertus, non seulement en matière d’empreinte carbone et de bien-être des occupants, mais aussi en matière d’organisation des chantiers. La construction « hors-site » (préfabrication, construction sèche) qui représente un atout majeur en matière de réduction des délais de construction, de consommation d’énergie, et de pénibilité des tâches pour les ouvriers, a même révélé une vertu supplémentaire en période de confinement, celle de moins impacter le ralentissement de l’activité de la construction, du fait même de la préfabrication en atelier. Sans compter que l’approvisionnement de matériaux locaux (le bois des forêts européennes) permet de s’affranchir de la dépendance des importations lointaines, au moment où la mondialisation a montré toutes ses limites.

La capacité de résilience des circuits courts est donc un enjeu important de l’évolution de la ville en général, et de la construction en particulier.

Mixité et convertibilité
La période de confinement a aussi révélé un autre enjeu de la ville de demain, celui de la mixité des usages. Nous pouvons parfaitement vivre, travailler et consommer dans un périmètre restreint voir dans un seul et même immeuble, pour autant qu’il soit généreux, bienveillant à l’égard de tous et de chacun, et conçu intelligemment, c’est-à-dire associant approche bioclimatique et utilisation raisonnée des technologies.

Le recyclage doit aussi être envisagé à l’échelle des bâtiments. D’une part, les bâtiments existants peuvent changer d’affectation, nombre d’immeubles de bureaux sont aujourd’hui transformés en logements par exemple, et d’autre part, les bâtiments neufs doivent être conçus pour pouvoir changer d’affectation au cours de leur vie, et pouvoir être désassemblés plutôt que détruits en fin de vie, pour en recycler la matière première.

La convertibilité du bâti est donc un enjeu de la construction de demain, avec, au cœur de cette réflexion, à l’échelle de l’individu, la question de son espace vital.

Espace vital et biodiversité
L’espace de vie de chacun est une notion très relative. Elle dépend de nombreux paramètres qui influent sur notre perception de cet espace, à commencer par son dimensionnement. Pour autant, il est prouvé scientifiquement que la perception de tout ce qui est naturel (lumière naturelle, air naturel, matériaux naturels, végétaux) impacte positivement notre organisme (biophilie), donc notre bien-être.

A ce titre, la terrasse est apparue, en période de confinement, un complément indispensable de notre espace de vie. Végétalisée ou non, elle est un lieu de respiration, de décompression. C’est la notion même d’espace non directement utile, au sens de la programmation classique d’un bâtiment. Des espaces informels, de repos, de rencontre, propices à l’épanouissement individuel et collectif.

Une notion qui prend toute sa dimension aussi dans l’espace collectif, à l’échelle d’un bâtiment multi-occupants comme à l’échelle de l’espace public, et à laquelle la biodiversité s’avère être le complément vital et salutaire, salutaire pour les individus, salutaire pour l’équilibre subtil à préserver entre la ville et la nature. Une biodiversité qui s’invite à l’intérieur des immeubles, sur ses façades, sur ses toitures, dans l’espaces public, et qui s’organise en jardins partagés, contemplatifs ou productifs. Fruits et légumes, plantes médicinales nous rappellent alors que l’humain se soigne aussi du vivant, se nourrit du vivant.

La ville est donc un extraordinaire laboratoire de recherche quant à l’évolution de nos comportements et de notre manière de construire, et les concepteurs du cadre de vie sont en première ligne de cette recherche, cristallisant dans leurs réalisations toute la complexité de ce qui fait l’organisation des êtres humains sur terre.

Auteur: David Roulin, Architecte – CEO, Art & Build Architect

Légende photo principale: Biotope_Biodiversity in the City

Illustrations:

  • Musa_Cities of Tomorrow
  • Pholiage_Biomimetic Approach
  • Timber Construction_New Way Of Building
  • VLXM_ New Way Of Living
  • Nautile Sylvestre_Curved Cross Lamimnated Timber

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